[CERVEAU] Pourquoi la pornographie nous marque t-elle autant ?
Il est assez étonnant de voir à quel point notre cerveau retient certaines choses, et en oublie d’autres. Avec la pornographie, l’impact des images marque le cerveau d’une manière très puissante, à tel point par exemple qu’il garde à vie la première image à caractère sexuelle à laquelle il est confronté.
Comment expliquer ce phénomène ?
La pornographie est une science-fiction.
La science-fiction est un genre majeur dans le cinéma (et la littérature), qui se fonde sur la création d’un monde imaginaire à partir d’idées perçues comme impossibles à réaliser. Elle utilise à cet effet de nombreux effets spéciaux très vraisemblables, dont l’exagération ou le caractère extra-ordinaire donnent un caractère fantastique et extrêmement attirant à cet univers créé.
Or que trouve-t-on dans la pornographie ?
Des corps parfaits et bien définis. Des mesures et des formes idéales. Des organes sexuels à taille démesurée. Des réponses sexuelles exagérées et peu ajustées à la réalité... La pornographie correspond à une séquence sexuelle projetée sur un écran qui raconte un événement se déroulant dans un cadre imaginaire. Ainsi, la personne qui consomme du porno ne regarde pas quelque chose de réel, mais plutôt, une fiction sur le sexe. La déconnection vis-à-vis du réel est telle que l’attrait de la fiction prend de plus en plus de place dans l’imagination de la personne.
Un contenu hyper-stimulant
C’est aussi par la diversité du contenu et le pouvoir d’excitation que produit la pornographie sur le consommateur que celle-ci se convertit en hyperstimulation, ou stimuli « supra-normaux ». La couleur, la taille, le son, … tout a une importance.
Ces stimuli ont été étudiés sur des animaux et découverts par Nikolaas Tinbergen, zoologue néerlandais, père de l’étiologie (étude scientifique du comportement animal) et prix Nobel de la médecine en 1973. Il a mené ses recherches auprès de plusieurs animaux, dont les poissons et les papillons, en étudiant leur comportement social. Il a découvert que les mâles préféraient s‘approcher des femelles fabriquées artificiellement (faits avec des couleurs très attirantes et pétillantes, et d’une plus grosse taille) qu’aux femelles réelles.
Ce type de stimuli consiste en une version exagérée d’un stimulus déterminé avec le but de provoquer une réaction plus puissante que celle qu’est capable de réveiller le stimulus au naturel. Un exemple que l’on trouverait dans notre vie quotidienne serait le fast-food : il s’agit d’une version exagérée des aliments naturels, car les niveaux de graisse et de sucres sont démultipliés. Chez les tout petits, on peut aussi observer leur préférence d’objets ou jouets grands et colorés et si possible, sonores !
Deirdre Barrett, psychologue à Harvard, il a déployé cette recherche sur les stimuli mais en l’appliquant chez la personne humaine. Il a confirmé que cela avait un très grand impact sur la sexualité.
La pornographie online est devenue le super stimulus du sexe !
Tout a un prix
Il existe à ce jour très peu d’études qui montrent toutes ces conséquences. Mais les professionnels de santé mentale et sexuelle sont confrontés à cette réalité au quotidien.
Les personnes qui demandent de l’aide à cause de leur consommation de pornographie rapportent les conséquences suivantes (1) :
Vision de la femme comme un objet sexuel, au point d’avoir des difficultés pour garder des amies, collègues d’université ou de travail
Perte d’habiletés sociales pour séduire
Incapacité à maintenir des relations stables avec son partenaire
Suppression de l’affect et de l’intimité lors des rencontres sexuelles, en arrivant même à les convertir en relations agressives
Estime de soi très basse à cause de la comparaison aux performances sexuelles ou aux corps parfaits des acteurs porno
Satisfaction sexuelle diminuée de manière générale
La conséquence la plus fréquente est le développement de dysfonctions sexuelle, dont la dysfonction érectile la plus répandue. Ce dysfonctionnement est caractérisé par l’incapacité de maintenir une érection dans les rapports sexuels, suivie de hauts degrés de frustration. Bien qu’il y ait très peu d’études pour montrer cette réalité, les psychologues rencontrent très souvent ce problème. L’une des hypothèses discutées est la suivante : la personne s’habitue à s’exciter sexuellement par des stimuli sexuels spécifiques (écran, corps disproportionnés et organes sexuels, réponses sexuelles qui ne sont pas conformes à la réalité...) ce qui rend la réponse sexuelle très rapide et la satisfaction immédiate. Lorsque ces personnes font face à une relation sexuelle avec une personne réelle, selon les mots de Nikolaas Tinbergen, le corps ne répond pas de la même manière, prenant beaucoup de temps pour avoir l’érection et parfois, en n’arrivant pas l’atteindre.
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Sources:1. Estudio de la nueva pornografía y relación sexual en Jóvenes (2014). Lluis Ballester Brage, Carmen Orte Socías, Rosario Pozo Gordaliza. Universitat de les Illes Balears.
2. Dwulit AD, Rzymski P. (2019). The Potential Associations of Pornography Use with Sexual Dysfunctions: An Integrative Literature Review of Observational Studies (2019). University of Medical Sciences. Polonia.